mardi 24 février 2009

Mémoire présenté et déposé à la CPTAQ sur l'apiculture

Opposition à l’implantation de la station de pompage de Pipeline Montréal Ltée

date : le mardi 24 février 2009 à Longueil, Québec.

Objet du présent mémoire :

Demande de réévaluation de l’expertise agroforestière produit par UDA Conseil, au nom de Pipeline Montréal Ltée, pour oubli majeur de l’apiculture dans l’étude d’impact.


Par la présente,


Je soumets à la Commission de Protection du Territoire Agricole du Québec (CPTAQ) l’absence totale de prise en considération de la présence d’une production apicole par le document d’expertise agroforestière produit par le groupe Conseil UDA inc.


En effet, dans le cadre d’une étude d’impact sur le milieu agricole de la municipalité de Dunham, advenant le dézonage agricole du lot 145-P pour le profit industriel privé de la compagnie Pipeline Montréal Ltée (PMPL), le document fournit à la CPATQ ne mentionne aucunement la présence d’une exploitation apicole à moins de 5 km de distance du futur site d’implantation.


Situé au 1107 de la rue Dymond, sur la municipalité de Dunham, «Les trois acres» représente une exploitation de 120 ruchers environs, dont une grande partie se trouve établie autour de la propriété. La production mellifère de M. Stéphane Crawford, le propriétaire de l’exploitation, représente son principal revenu financier.


Je me permet respectueusement de souligner que selon l’article 1 de la LPTAA, l’apiculture fait partie intégrante de l’agriculture, à titre d’activité agricole et d’élevage d’animaux tel qu’indiqué comme suit :

Interprétation et application de la LPTAA.

Article 1. Dans la présente loi, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par:


Activités agricoles.

Lorsqu'elles sont effectuées sur sa ferme par un producteur à l'égard des produits agricoles qui proviennent de son exploitation ou accessoirement de celles d'autres producteurs, les activités d'entreposage, de conditionnement, de transformation et de vente des produits agricoles sont assimilées à des activités agricoles;


«Agriculture»

1° «agriculture»: la culture du sol et des végétaux, le fait de laisser le sol sous couverture végétale ou de l'utiliser à des fins sylvicoles, l'élevage des animaux et, à ces fins, la confection, la construction ou l'utilisation de travaux, ouvrages ou bâtiments, à l'exception des immeubles servant à des fins d'habitation.


I) Dénonciation d’un manque d’évaluation d’une production agricole : l’apiculture.

La production mellifère, mais également la pollinisation des arbres fruitiers et autres essences florales, représentent une activité incontournable de l’apiculture, au sein de l’agriculture du Québec. Outre la production en pomiculture et en viticulture sur le territoire de la municipalité de Dunham, la présence d’une exploitation apicole implique une production liée à l’agriculture avec la pollinisation florale et l’agrotourisme avec la production de miel. (Voir annexe 1 et annexe 2)


L’impact de l’implantation d’une station de pompage sur le lot 145-P implique possiblement la destruction d’un espace sauvage de butinage utilisé par des abeilles. Considérant que l’espace en friche est nommé «sol arable» par l’expertise UDA, je souligne que, dans l’article 1 de la LPTAA, l’alinéa 16° définit «sol arable» comme tel: le sol possédant les propriétés qui le rendent propice à la croissance des végétaux.


La définition de la LPTAA sur la notion de sol arable, implique la présence de fleurs sauvages nécessaires à l’apiculture. Le Lot 145-P entre pleinement dans les caractéristiques d’un espace propice à la croissance de végétaux, éléments incontournables pour la production de miel.


Le document produit en date du 27 octobre 2008, sous le numéro de dossier UV-426, sur l’évaluation réelle des impacts sur le milieu agricole ne tient pas compte de la présence des ruchers apicoles «Les trois acres». Elle ne prend pas en compte également toutes autres exploitations apicoles sur Dunham et Sutton, comprises dans un espace d’exploitation de 8 km minimum (distance moyenne d’une activité de butinage pour les abeilles).

Pour preuve, dans le point mentionné « MUNICIPALITÉ» du chapitre 6 du document produit par UDA Conseil, la définition du milieu environnant de la municipalité de Dunham indique seulement que le territoire agricole de la municipalité de Dunham «est caractérisé par la présence de production bovine (24), avicole (17), laitière (12) et caprine (10)… et quelques écuries d’élevages»1.


Dans le point mentionné «LOCAL», UDA Conseil indique « Également, dans le secteur environnant compte quelques établissements de productions animales (bovins de boucherie, chevaux)»2, ignorant totalement la présence d’une production d’abeilles dans l’espace agricole proche du lot 145-p.


Le manque d’évaluation de toutes les formes d’agriculture de cette expertise, impliquant l’oubli de l’apiculture, contredit l’affirmation faite par UDA Conseil, au chapitre 8 de son document. Concluant que « la localisation du site privilégié a été faite en fonction de critères de localisation d’ordre technique, socio-économique et environnemental dont l’agriculture et la foresterie font notamment partie»3.

II) Problématique du manque d’étude d’impact sur l’apiculture par UDA Conseil.


Le dossier d’expertise ne permet pas de connaître les effets réels de la perte d’espace agricole en friche ayant un impact sur le butinage d’abeilles. Le lot 145-P est situé à moins de cinq kilomètres de la rue Dymond, alors que les abeilles ont un rayon de butinage de huit km, selon l’exploitant.


Même si le lot 145-P de 2,2 hectares ne représente par la seule superficie possible de butinage, elle est une des rares terre en friche permettant d’avoir une floraison sauvage. La fenêtre de l’étude ne prend pas en compte les espaces agricoles liés à l’élevage apicole. La présence d’abeille n’est pas comptabilisée dans le calcul des distances d’élevage d’animaux.


Pour rappel, la production de miel de l’exploitation «Les trois acres» comprend la dénomination d’un produit agro-alimentaire Miel de Fleurs sauvages. Dans le cas présent, le lot 145-P représente un terrain en friche, de sol arable, comprenant plusieurs variétés de végétaux, graminées et floraux, susceptibles de servir au butinage des abeilles appartenant aux ruchers «Les trois acres».


Selon la LPTAA pour la protection du territoire agricole l’article 1.1 comprend « la pérennité d’une base territoriale pour la pratique de l’agriculture »4. La notion de base territoriale prévaut également pour un espace végétal utile à la production mellifère. Les résultantes d’un bouleversement d’un sol arable, établissant une diversité végétale et florale depuis plusieurs années, peut-il compromettre la santé et la production des abeilles sur place? Le bouleversement d’un écosystème, même minime, est-il envisageable dans le cas présent.


A mes interrogations sur la présence d’abeilles proche du lot 145-P, M. Stéphane Crawford m’a informé qu’il avait déjà installé des ruches proches à proximité de ce lot au coin des chemins Favreau et Childerhouse. Cette zone lui permet d’installer plusieurs ruches dans le but de diversifier la floraison de sa production.


Pour raison faunique majeure, soit la présence destructrice d’ours bruns sur les ruches, il a provisoirement perdu ses ruches dans cette région. L’exploitant envisagé pourtant un réaménagement de ses ruches à cet endroit, car il considère l’emplacement comme facile d’accès, ayant déjà négocié un droit de passage avec le propriétaire d’un terrain local.


La construction de bâtiment n’est pas une problématique majeure pour l’implantation et la protection des ruches dans le secteur du lot 145-P. Cependant, l’enlèvement du sol arable prévu par PMPL sur le site même, implique la destruction de tout le contenu végétal de surface pour une durée mal définie.



III) Reconsidérer la présence d’une activité apicole sur le lot 145-P

Au chapitre 7, l’expertise indique clairement cette intention, soit « Le sol arable sera enlevé sur toute la superficie du chemin d’accès et de l’aire clôturée. Il sera entassé temporairement pendant la durée des travaux de construction pour être utilisé par la suite lors des travaux de remise en état.»5


La question de la remise en état du sol arable se pose quand aux délais et à la quantité disponible à nouveau sur la même superficie. Quelle type de floraison peut repousser après avoir été détruite, quelle soit florale ou graminée.


La question de l’impact d’une contamination possible par hydrocarbure sur le lot 145-P représente également un risque pour la santé des abeilles. Sans parler ici de fuite majeure, la présence des échappements de gaz, des moteurs servant à propulser le pétrole dans le pipeline, reste sujette à questionnement.


En résumé, l’implantation d’une station de pompage sur le lot 145-P présente un risque potentiel de perte d’espace de récolte pour la production de miel sauvage, même minime, car les abeilles ont des habitudes de recherches exploratoires.


Le risque ne vient pas de la présence d’un bâti ou du pipeline proprement dit, mais de la destruction d’une végétation nécessaire à la production de miel, au dérangement des habitudes de butinage sur le lieu et au risque éventuel de maladie du cheptel par contamination d’hydrocarbure et autres dérivés pétroliers.


Le présent mémoire veut démontrer que l’implantation du projet d’une station de pompage est susceptible de contrevenir à une activité agricole, soit l’apiculture, étant donné que l’expertise de UDA Conseil ne prend pas en compte cette activité agricole.


Je souligne que dans le chapitre 9 dudit document, le point 9-3 mentionne clairement «Il n’y a actuellement aucune activité agricole sur le site visé par la demande. L’autorisation demandée n’aura donc aucun impact négatif sur les activités agricoles existantes en ce qui a trait au site visé en tant que tel.»6.


Par conséquent, les activités apicoles n’ont pas été considérées à leur juste valeur agricole, ainsi qu’au niveau de la production de produits agro-touristiques, liés à la présence d’abeilles sur le lot 145-P. La sauvegarde de cet espace doit être prit en considération pour protéger un territoire de production agricole.


En conclusion, je demande à la CPTAQ de reconsidérer la demande d’implantation produite par PMPL sur le lot 145-P, considérant que leur étude a ignoré une activité fondamentale de l’agriculture locale, soit l’apiculture.


source et note

Source : www.apiculteurduquebec.com (Fédération des Apiculteurs du Québec)

1UDA Conseil inc., Expertise agroforestière : projet d’inversion du pipeline de PMPL, Chapitre 6 : données agroforestières, point 6-1 – Municipalité- p.6-2.

2 Opus cité, Chapitre 6 : données agroforestières, point 6-1-Local- p.6-2.

3 Opus cité, Chapitre 8 : discussion en vertu de l’article 61.1 de la LPTAA, p. 8-1

4 www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca, L.R.Q chapitreP-41-1, LPTAA, chapitre 1, article 1.1. Le régime de protection du territoire agricole institué par la présente loi a pour objet d'assurer la pérennité d'une base territoriale pour la pratique de l'agriculture et de favoriser, dans une perspective de développement durable, la protection et le développement des activités et des entreprises agricoles dans les zones agricoles dont il prévoit l'établissement. (1996, c. 26, a. 4.)

5UDA Conseil inc., Expertise agroforestière : projet d’inversion du pipeline de PMPL, Chapitre 7 : mesure préventive/atténuation, tableau 7.1 : sol arable, p.7-1.

6 Opus cité, chapitre 9 : évaluation des impacts en vertu de l’article 62 de la LPTAA, point 9-3 Impacts sur les activités agricoles existantes te leur développement, p.9-2.

Annexe 1

Rôle écologique

La pollinisation est un rôle de l’abeille de la plus haute importance. Cette dernière transporte le pollen d’une fleur à l’autre et en assure ainsi la fertilisation par pollinisation croisée. Tout ceci contribue à améliorer la qualité des fruits de la plante ainsi que son rendement. Le butinage, lui, sert au maintien de la diversité végétale.

L’abeille domestique fournit chaque année l’équivalent de plusieurs millions de dollars de miel, de cire et autres produits de la ruche, sans compter son inestimable travail de pollinisation.

La présence de ruches améliore la productivité d’une foule de cultures (bleuets et autres petits fruits, pommiers, orangers, canola, canneberges, tournesol, tomates, etc.).

L’abeille domestique est l’insecte pollinisateur le plus abondant dans les régions agricoles du Québec.

Source : www.apiculteurduquebec.com (Fédération des Apiculteurs du Québec)


Annexe 2

Quelques statistiques

  • Selon l’Institut de la statistique du Québec, il y avait en 2006 au Québec, environ 266 apiculteurs (disposant d’au moins 6 colonies), pour un total d’environ 35 545 ruches.

  • Selon Statistiques Canada, il y avait au Canada, en 2005, quelque 7 500 apiculteurs pour un total d’environ 600 000 ruches.

  • Le Québec produit environ 8% de la production de miel au Canada. C’est dans les provinces des Prairies (Alberta, Saskatchewan et Manitoba) que se concentre la plus importante production de miel du pays, soit plus de la moitié.

  • Le Québec ne fournit que 25 % de la demande en miel dans la province, pour une production totale d’environ 1 500 tonnes métriques de miel par année.

  • Le rendement en miel d’une ruche au Québec est d’environ 50 kg. La consommation annuelle moyenne de miel au Québec est de 0,81 kg / personne.

  • Les recettes du domaine apicole sont évaluées à 8 M$ au Québec en 2006. Les deux principales sources de revenus sont la vente du miel et la pollinisation par les abeilles, service offert par les apiculteurs aux autres productions agricoles comme la culture des fruits et des légumes.

  • Environ 40 % de notre assiette au Québec provient directement ou indirectement du travail des abeilles par la pollinisation des fruits, légumes et autres plantes.

  • Sources :

  • Institut de la statistique du Québec

  • Statistiques Canad